Ce sont les activités visant la satisfaction des sens et dont le seul but est de plaire au mental et aux sens, qui sont la cause de l’enchaînement à la matière. Tant que l’âme s’adonne à ces actions intéressées, elle ne cessera pas de se réincarner d’une espèce à une autre.
Lorsque quelqu’un considère la satisfaction des sens comme le but de sa vie, il s’engage dans la vie matérielle à en devenir fou et se livre à toutes sortes d’activités coupables. Il ne sait pas que c’est en raison de ses méfaits passés qu’il a déjà reçu un corps matériel, qui, malgré sa nature transitoire, est à l’origine de sa souffrance. En vérité, l’être distinct (l’âme spirituelle distincte de Dieu) n’aurait jamais dû revêtir cette enveloppe charnelle, mais celle-ci lui a été attribuée pour la satisfaction de ses sens. Aussi, Je ne crois pas qu’il sied à un homme intelligent de s’empêtrer à nouveau dans des activités matérielles qui l’obligeraient perpétuellement à revêtir des corps, vie après vie. Tant que l’être vivant ne s’enquiert pas des valeurs spirituelles de l’existence, il doit connaître la défaite et les maux issus de l’ignorance. Qu’il relève de la vertu ou du péché, le karma porte ses fruits, et si une personne est impliquée dans une forme ou une autre de karma, on qualifie son mental de « teinté » du désir de jouir des fruits de l’action. Aussi longtemps que le mental demeure impur, la conscience reste obscurcie, et tant que l’on suit la voie de l’action intéressée, on doit revêtir un corps matériel. Quand l’être vivant est sous l’influence de l’ignorance, il ne peut comprendre la nature de l’âme distincte [l’âme spirituelle individuelle distincte de Dieu] et celle de l’Âme Suprême, son mental subit alors le joug de l’action intéressée. En conséquence, tant qu’il n’aura pas d’amour pour Dieu, il ne sera certainement pas dispensé de revêtir des corps matériels. Sous l’influence des trois gunas [les trois attributs et modes d’influence de la nature matérielle ; la vertu, la passion et l’ignorance], l’âme égarée par le faux ego [s’identifier à son corps et dominer la nature matérielle] croit être l’auteur de ses actes, alors qu’en réalité, ils sont accomplis par la nature matérielle. Question posé par un sage au Seigneur : A quels signes reconnaît-on l’être qui a dépassé les trois gunas [les trois attributs et modes d’influence de la nature matérielle ; la vertu, la passion et l’ignorance], comment se comporte-t-il, et par quelles voies transcende-t-il ces gunas ?
Le Seigneur Krishna répond : Celui qui n’éprouve aucune aversion, qu’il soit devant l’éclairement, l’attachement ou l’illusion, qui n’éprouve également aucune soif de ces choses en leur absence, qui, au-dessus de ces fruits que portent les trois gunas se tient comme neutre, toujours inflexible, conscient de ce que rien n’agit en dehors d’eux, qui regarde d’un même œil le plaisir et la souffrance, et pour qui la motte de terre, l’or et la pierre sont d’égale valeur, qui est sage et tient pour identique l’éloge et le blâme, qui n’est affecté ni par la gloire ni par l’opprobre, qui traite également amis et ennemis, et qui a renoncé à toute entreprise intéressée, de celui-là on dit qu’il a transcendé les trois gunas. Celui qui s’absorbe entièrement dans le service de dévotion, sans jamais faillir, transcende dès lors les trois gunas et atteint ainsi le niveau spirituel.